Pignon Fixe, Fixed Gear… La mode se répand, la tendance envahit la ville!

Tout le monde aura remarqué la prolifération sidérante du « fixie » à Paris depuis plus d’un an, et bien sûr, beaucoup s’interrogent. Le vélo de piste ou vélo à pignon fixe est d’abord différent d’un vélo ordinaire sur le plan technique, mais cette différence lui permet aussi d’atteindre à une pureté esthétique à laquelle il doit une grande partie de son succès.

« …officiellement, ce type de vélo n’est plus utilisé aujourd’hui que sur les vélodromes…» Sa particularité est de ne pas posséder de roue libre, contrairement à tous les vélos depuis un siècle, la roue libre étant le mécanisme qui permet d’arrêter de pédaler tout en continuant à rouler ; officiellement, ce type de vélo n’est plus utilisé aujourd’hui que sur les vélodromes. Sont donc exclus le dérailleur, les vitesses, et en principe les freins ; le pédalier est en effet solidarisé à la roue arrière par la chaine ; tant que la roue tourne il est impossible de s’arrêter de pédaler, ce qui veut dire aussi que l’on peut ralentir voire bloquer la roue arrière avec le seul mouvement des jambes, et par suite s’arrêter totalement sans système de freinage particulier.

D’où cette sensation de contrôle total du vélo tant appréciée des aficionados de tout bord que vous voyez aujourd’hui circuler en ville sur ce genre d’engin. Le vélo devient comme une partie du corps, l’expérience est intense et les sensations musculaires aussi agréables qu’étonnantes ; vous vous devez cependant de rester totalement concentré au risque de vous voir éjecté du vélo si vous arrêtez de pédaler.

« …il fait de toute côte un calvaire et de toute descente un suicide…» En terme d’effort, l’avantage de ce type de transmission est de procurer une grande inertie au vélo, c’est-à-dire qu’à chaque coup de pédale, en plus de l’inertie propre à tout corps en mouvement, s’ajoute celle de la roue arrière qui, continuant de tourner, « pousse » le pédalier tandis que vous l’actionnez encore. D’où une grande puissance au démarrage et à la relance, avec un peu la sensation d’être assisté d’un moteur électrique, et la raison pour laquelle le pignon fixe n’a jamais été abandonné sur les vélodromes, car cette force additionnelle permet d’entrainer un braquet et donc une vitesse plus élevé que ne le permet une roue libre dans les mêmes conditions. Reste que sur tout autre terrain, si le pignon fixe peut aider à passer certains « faux-plats », avec un seul et unique braquet, sans roue libre, il fait de toute côte un calvaire et de toute descente un suicide.

L’usage du fixie en ville est donc un parfait exemple de contre-emploi, pour beaucoup motivé par un effet de mode et son indéniable pureté esthétique. Si ce n’est en ce qui concerne la relance, l’essentiel du pilotage en ville consiste effectivement en freinage, virage, montée, descente… tout le contraire d’une piste en bois lisse et plate comme un billard, et surtout libre de toute circulation.

« …nos genoux ne sont pas fait pour cela…» Ajoutez à cela que la géométrie ou la forme de ces vélos est d’ordinaire tellement compacte que le bout du pied vient toucher la roue avant lorsque l’on tourne, et que cette fameuse inertie qui vous aide au démarrage n’étant pas débrayable, cette sensation de poussée se prolonge au moment même ou vous devez ralentir. A tel point que les entraineurs de piste déconseillent le freinage violent, qui nécessite l’effort inverse d’une accélération, c’est-à-dire d’appuyer sur la pédale à la montée et de la retenir à la descente, et nos genoux ne sont pas fait pour cela.

Un grand nombre de pignons fixes urbains sont donc intelligemment équipés de freins ordinaires, ce qui garantit à l’utilisateur une sécurité nettement accrue sans risque pour ses articulations, sans le priver non plus de la sensation originale puisqu’il roule sur un véritable pignon fixe ; à cet effet, la plupart des marques commercialisant des vélos de ce type (Cinelli, Specialized, Cannondale) les distribuent avec les freins, laissant libre choix au cycliste de les enlever par la suite.

« …les chinois ont d’ores et déjà investi ce marché…» Pour la petite histoire, l’usage urbain du vélo de piste est à l’origine une idée des premiers coursiers à vélo new-yorkais, pour la simple raison que ces vélos peuvent se bricoler assez facilement sur la base d’un vieux vélo de route, demandant alors peu d’entretien ou de réglage et coutant beaucoup moins cher qu’un vélo complet. C’est d’ailleurs à l’image de ces célèbrissimes pionniers que tant d’amateurs parisiens s’équipent aujourd’hui de pignons fixes, la mode étant même de pousser la ressemblance jusqu’à utiliser les mêmes sacs, les mêmes antivols, vêtements et autres accessoires. A cette différence près que les pièces étant toujours aussi peu nombreuses, il n’existe pas d’entrée de gamme dans le matériel de piste, et la mode aidant, ces vélos s’arrachent aujourd’hui à des prix dépassant souvent celui d’un vélo de course de qualité égale.

Néanmoins, les chinois ont d’ores et déjà investi ce marché et l’on trouve aujourd’hui dans certains magasins des fixies complets pour le prix d’une roue avant… qui sont au pignon fixe ce que les vélos de supermarché sont au vélo de ville…

Le JDC. 11/2009
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